La Libellule - Paris (Doisneau)

Les profils d’apprentissage – Un aperçu historique

L’histoire des profils d’apprentissage est marquée par l’évolution des théories pédagogiques et psychologiques cherchant à comprendre comment les individus apprennent. Ces profils permettent d’identifier les modalités par lesquelles les élèves perçoivent, traitent et retiennent l’information. Ils sont au cœur de l’idée que chaque apprenant a une manière privilégiée d’aborder les apprentissages, une idée qui s’est développée au fil du temps avec l’apport de plusieurs théoriciens et pédagogues. Origine et premières idées 1. Jean-Jacques Rousseau (1712 – 1778) et l’éducation centrée sur l’enfant Jean-Jacques Rousseau, dans « Émile ou De l’éducation » (1762), fut l’un des premiers à proposer une éducation individualisée, en soulignant l’importance de respecter les rythmes de chaque enfant. Il prônait une pédagogie naturelle qui s’adapte aux capacités et aux besoins de l’élève, anticipant ainsi les futures réflexions sur les différents profils d’apprentissage. 2. Johann Heinrich Pestalozzi (1746 – 1827) Johann Heinrich Peztalozzi, connu pour avoir cherché à appliquer les principes de l’Émile de Rousseau, est un pionnier de la pédagogie moderne. Éducateur, il croyait fermement que l’enseignement devait être adapté à chaque élève, en fonction de son développement intellectuel, émotionnel et physique. Il tenait également à une approche holistique de l’éducation, dans laquelle l’apprentissage se fait à travers l’expérience sensorielle, intellectuelle et morale. Intégrant plusieurs dimensions du développement de l’enfant, cette vision peut être considérée comme une des bases des profils d’apprentissage. 3. Maria Montessori (1870-1952) Médecin et pédagogue italienne, Maria Montessori a développé la pédagogique active, centrée sur l’autonomie et la liberté de l’enfant dans un cadre préparé. Elle met l’accent sur le développement global de l’enfant, qu’il soit cognitif, émotionnel, ou physique. L’enfant est ainsi placé au centre du processus d’apprentissage, avec une attention particulière à ses besoins individuels. Maria Montessori a ainsi contribué de manière significative à la pédagogie différenciée par sa conception d’un environnement éducatif adaptable aux diverses phases du développement de l’enfant. Les apports de la psychologie cognitive et de l’apprentissage Avec l’essor de la psychologie au XXe siècle, de nombreuses théories sur l’apprentissage ont émergé, posant les bases de l’idée de profils d’apprentissage. 1. Jean Piaget (1896-1980) Piaget, psychologue suisse, a développé une théorie du développement cognitif basée sur des stades, selon laquelle les enfants passent par des phases d’apprentissage spécifiques à chaque âge. Ses travaux ont montré que les individus n’apprennent pas tous de la même manière à un moment donné, suggérant que l’enseignement devait être ajusté en fonction du stade cognitif de chaque élève. 2. Burrhus Frederic Skinner et le béhaviorisme (1904-1990)Skinner et les béhavioristes se sont concentrés sur la manière dont les comportements sont influencés par des stimuli extérieurs. Bien qu’ils ne parlaient pas directement de profils d’apprentissage, leurs travaux ont encouragé les éducateurs à utiliser des méthodes différenciées pour influencer les réponses comportementales des apprenants, jetant les bases de l’adaptation pédagogique. 3. Lev Vygotski (1896-1934)Vygotski, psychologue russe, a proposé la théorie de la « zone proximale de développement » (ZPD), qui souligne que les élèves apprennent mieux lorsqu’ils sont aidés à progresser juste au-delà de leur niveau actuel avec l’aide d’un enseignant ou d’un pair plus avancé. Il a également insisté sur l’importance du « contexte social » dans l’apprentissage, suggérant que les apprenants pourraient avoir des besoins pédagogiques différents selon leur environnement et leur culture. Les profils d’apprentissage dans l’éducation moderne 1. Les styles d’apprentissage de David Kolb (1984) David Kolb, psychologue américain, a développé un modèle influent des « styles d’apprentissage » dans son ouvrage « Experiential Learning ». Il propose l’hypothèse que tout apprentissage est constitué d’un processus cyclique qui inclut quatre phases : l’expérience concrète (vivre l’expérience) ; l’observation réfléchie (réfléchir sur l’expérience) ; la conceptualisation abstraite (former des concepts) ; l’expérimentation active (tester les concepts dans de nouvelles situations).Selon lui, chaque individu privilégie une ou plusieurs de ces phases dans son processus d’apprentissage, ce qui définit son « style d’apprentissage ». Il a ainsi identifié quatre types d’apprenants : les divergents (préférant l’observation et l’expérience concrète) ; les assimilateurs (privilégiant l’observation et la conceptualisation abstraite) ; les convergents (préférant la conceptualisation abstraite et l’expérimentation active) ; les accommodateurs (privilégiant l’expérience concrète et l’expérimentation active). 2. Les intelligences multiples de Howard Gardner (1983)Howard Gardner, professeur de psychologie à Harvard, a révolutionné la conception de l’intelligence en introduisant sa théorie des « intelligences multiples » dans son livre « Frames of Mind ». Il a proposé que l’intelligence n’est pas un concept unique, mais qu’elle se manifeste sous plusieurs formes distinctes. Il distingue ainsi les intelligences linguistique, logique-mathématique, spatiale, musicale, kinesthésique, intrapersonnelle, interpersonnelle, naturaliste et existentielle.Gardner a montré que chaque individu possède une combinaison unique de ces intelligences, et que l’enseignement doit s’adapter à ces divers profils d’intelligence s’il veut optimiser l’apprentissage. Cela a contribué à une approche plus différenciée de l’enseignement, en cherchant à exploiter les forces particulières des élèves dans leurs processus d’apprentissage. 3. Les styles d’apprentissage de Fleming (VAK/VARK, 1987) Neil Fleming a introduit le modèle VARK (Visuel, Auditif, Lecture/Écriture – Reading, Kinesthésique), qui identifie quatre modes d’apprentissage principaux. Ce modèle propose que chaque individu a une préférence pour un mode sensoriel d’apprentissage :– la visualisation (apprentissage par des images, graphiques, et diagrammes) ;– l’audition (apprentissage par l’écoute : conférences, discussions) ;– la lecture/écriture (apprentissage par la lecture de textes et l’écriture) ;– la kinesthésie (apprentissage par l’action, le mouvement et l’expérimentation physique). Ce modèle a été largement utilisé pour adapter les méthodes d’enseignement à la diversité des styles d’apprentissage des élèves. 4. Antoine de La Garanderie et la gestion mentale (1970s-2000s)En France, Antoine de La Garanderie, philosophe et pédagogue, a introduit la notion de « gestion mentale », en s’intéressant aux différents gestes mentaux que les individus utilisent pour apprendre (voir, entendre, se représenter, réfléchir, etc.). Son travail a mis en avant l’importance de comprendre comment chaque élève traite l’information, renforçant l’idée que les enseignants doivent identifier et travailler avec les profils cognitifs spécifiques de chaque élève. Conclusion L’histoire des profils d’apprentissage est marquée par une évolution continue des idées pédagogiques et psychologiques qui reconnaissent la diversité des façons dont les individus apprennent. Des personnalités comme Rousseau, Pestalozzi et Montessori, ainsi que des psychologues comme Piaget, Gardner et Kolb, ont contribué à cette compréhension croissante des différences

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